Cela implique, selon la Libye, que les indications d’ordre géographique ou géomorphologique ne permettent pas de déterminer les différentes zones de prolongement naturel, mais contribuent seulement à indiquer la direction du prolongement et par conséquent de la délimitation ; les principes d’équité peuvent cependant obliger à corriger le résultat en fonction d’autres circonstances pertinentes de caractère géographique « pour éviter un résultat manifestement injuste ou d’une inéquité flagrante ».« les « circonstances pertinentes »... ont d’abord pour fonction de contribuer positivement à la définition de la ligne de délimitation, notamment en permettant de déterminer ce qui constitue le prolongement naturel du territoire de chaque Etat ». Telle est l’argumentation caractérisée durant l’instance par l’expression « projection vers le nord », formule qui, d’après la Libye, n’exprime aucune idée de mouvement. Pour cela il est nécessaire de déterminer les limites maritimes de cette région qui, du côté terrestre, est bornée par les côtes de la Tunisie jusqu’à Ras Kapoudia et de la Libye jusqu’à Ras Tadjoura. La Cour considérera donc que la région se compose de deux secteurs. Ceux qu’avance la Libye à l’appui de sa thèse principale d’une projection vers le nord révélée par la géologie ne lui paraissent pas d’un poids tel que cette thèse doive l’emporter sur l’argumentation géologique que lui oppose la Tunisie ; en outre, ils ne fournissent en eux-mêmes aucun moyen permettant de reconnaître des prolongements naturels distincts — ce qui serait d’ailleurs contraire à la conception libyenne de l’unité du bloc pélagien. La Tunisie, quant à elle, avait accordé son premier permis en mer en 1964. En outre, la proportionnalité se rapporte à la longueur des côtes des Etats en cause et non à des lignes de base droites tracées le long de ces côtes. Il y a donc heu de se demander si la notion de plateau continental au sens de la deuxième partie de la définition peut jouer un rôle dans la décision en l’espèce. La Cour considère la convention de 1910 comme importante pour l’examen de la présente affaire parce qu’elle a fixé définitivement la frontière terrestre entre les deux Etats. Les titres historiques doivent être respectés et préservés, ainsi qu’ils l’ont toujours été en vertu d’un long usage.
Dans la procédure orale, les conclusions ci-après ont été présentées par les Parties :
L’application de la méthode de l’équidistance n’est pas obligatoire entre les Parties, que ce soit en vertu d’un traité ou d’une règle de droit international coutumier. Le sillon tripolitain est présenté comme « une véritable frontière naturelle sous-marine ». En pareil cas, cependant, l’élément physique du prolongement naturel n’est pas considéré comme la base d’un titre juridique mais comme l’une des circonstances à retenir en tant qu’élément d’une solution équitable. Already registered ? D’après la première partie du paragraphe 1, c’est le prolongement naturel du territoire terrestre qui est le critère principal. Il convient d’examiner à présent un autre facteur important aux fins de la délimitation, à savoir l’existence, devant les côtes de la Tunisie, d’une zone sur laquelle celle-ci revendique des droits historiques résultant de pêcheries très anciennes. Pourtant là encore les vues des Parties concordent, encore que moins nettement. La Cour n’examinant ici la question des caractéristiques géomorphologiques que par rapport à leur utilité éventuelle pour distinguer les prolongements naturels des deux Etats, et non pas sous l’angle de leur importance plus générale en tant que circonstances éventuellement pertinentes, qui seraient de nature à affecter pour d’autres raisons le tracé de la délimitation, sa conclusion peut être exprimée en peu de mots. Après la décolonisation, la frontière de 1910 devint la frontière entre les Etats indépendants de Tunisie et de Libye. La notion juridique du plateau continental reposant sur une « espèce de socle » est donc modifiée ou au moins complétée par ce critère.